Contribuer… intellectuellement – V est un collectif de cinq architectes. L’exercice de notre métier d’architecte est une question qui nous taraude depuis de longues années… Nous avons souhaité, chacun à notre manière, participer à cette proposition, comme pour nous le rappeler. Nos écrits seront alors tour à tour, libertaires, techniques, spirituels, cartésiens, bienveillants, littéraires, et pourquoi pas indignés.
Tel un palimpseste, les espaces urbanisés sont empreints des traces indélébiles de leur histoire car l’impact des interventions humaines sur un territoire est durable ; le seul choix raisonnable de l’urbanisme est d’être également durable. Être durable, c’est s’insérer dans un site dans le respect de ses éléments naturels et culturels ; agir pour l’environnement ; participer à l’économie locale ; proposer des interventions adaptées, à coûts maîtrisés, sans excès ni dépenses superflues ; intégrer les espaces créés ou rénovés aux tissus urbains existants, en privilégiant les relations entre les habitants, la cohabitation harmonieuse des choix individuels avec les intérêts collectifs ; favoriser la proximité et les liens sociaux.
Nous pensons que le changement ne peut se faire sans repartir de la base : la terre et les fondations. Inspirés de l’éthique du Care, nos interventions ont pour objectif de ménager des espaces afin d’offrir à chacun de vivre ensemble dans un quotidien apaisé et « possible ». Yona Friedman dit, dans son ouvrage l’architecture de survie, une philosophie de la pauvreté, vouloir reconsidérer le rôle de l’architecture dans la simple survie de l’espèce, sans user de slogans grandiloquents, sans surestimer ce rôle, et donc sans faire des propositions irréalisables. Nous lui emboitons le pas en espérant arriver à secouer la poussière qui s’est accumulée sur nos épaules.
Alors pourquoi V ? Parce que…
…l’architecture est fondamentalement expérimentale et ne peut par conséquent être encadrée comme elle l’est aujourd’hui ;
…l’architecture est profondément locale : elle doit réapprendre à faire avec ce qu’il y a sur place ;
…l’architecture est une question d’usage : les usagers doivent y prendre leur part ;
…l’architecture est un art : les architectes sont des femmes et des hommes de l’art dont les principales compétences sont de conseiller et d’accompagner ;
…l’architecture est essentielle : il faut diffuser au maximum les outils nécessaires pour participer à construire le monde qui vient ;
…cinq architectes en sont à l’initiative.
Contribuer… concrètement
Une nouvelle forme de pratiquer.
Avancer autrement, faire ensemble et apprendre, ensemble, encore.
savoir-faire
faire
faire-savoir
Pousser les murs de l’agence, explorer des territoires, imaginer des processus possibles, générer une commande à l’échelle humaine avec et pour les usagers. Ce décalage est la rupture nécessaire pour que cette nouvelle pratique provoque le désir de faire ensemble.
Un territoire c’est un pouvoir réfèrent et une organisation sociale ; par notre démarche, nous cherchons à éveiller la conscience du premier et susciter l’intérêt de la seconde, vers un dessein commun. Nous souhaitons désormais nous (et vous) soustraire aux contraintes contractuelles lourdes ; avancer à petit pas, laisser venir le projet, ou pas, sans la frustration de l’échec du projet calqué sur une réflexion « type ».
Comment ?
D’abord une balade : rôder, traîner, observer, partager, se mettre à l’écoute ; une sorte de diagnostic humaniste par la familiarisation : établir des hypothèses, adapter une démarche inductive, intuitive et spontanée. Nous ne venons pas seulement en techniciens.
Ensuite le poêle Rocket : notre foyer nomade, notre salon de rencontre sur la place publique, notre chaleur provocatrice d’idées et potentiels. Notre cellule de vie pour nous rapprocher de ceux qui habitent là et que l’on souhaite mieux connaître. Pour échanger, pour concevoir ensemble. Faire un feu. Réinventer l’auberge espagnole. Apporter sa bûche pour faire durer la soirée… Se réchauffer, cuire, manger, boire et discuter à tous vents. Nourrir son corps et son esprit.
Des échanges « autour du poêle » pour faire émerger une envie, peut-être même une envie de projet. Une émergence rendue possible grâce à la place que nous occupons, celle de la proximité et de la confiance tissées, en poussant vers l’autonomie ceux qui viendront vers nous… Car nous sommes là au service des autres, pour mettre nos compétences d’architectes au service des autres.
Alors, une fois la confiance établie, les barrières tombées, les envies de projet désacralisées et abordées avec simplicité, le travail peut commencer.
Le collectif -V-