Tout d’abord, notons que la finalité de l’acte de construire reste un bâtiment concret solide et sûr. D’autre part l’essentiel du besoin de bâtir est celui du logement. Ce besoin n’est pas obligatoirement satisfait par le marché. Or le logement n’est pas à proprement parler une marchandise quand il s’agit de l’attribuer à des personnes.
Ce qui n’est plus admis par les français c’est le spectacle des grandes opérations immobilières notamment de bureaux ou de standing inaccessible alors que le besoin vital de logement n’est pas satisfait. La maîtrise de son habitat est un droit imprescriptible de la personne humaine. Les phénomènes de contestation sont le signe d’une réappropriation de cette sphère du bâti dans le débat public. Nous passons définitivement de la notion « d’immeuble de rapport » hérité du XIXeme siècle à celui d’habitat partagé autogéré. Nous vivons un entre deux douloureux.
Les architectes et particulièrement les petites structures ont tout intérêt à dialoguer avec des interlocuteurs directement intéressés à se loger. La question à résoudre est celle du vecteur à créer pour collectiviser la demande de ceux et celles qui ne peuvent pas socialement prétendre à financer individuellement leur logement. Les outils des bailleurs sociaux mis en place dans les années 60 ne sont plus adaptés à la situation actuelle et freinent en réalité les capacités réactives des architectes. Comme dans le cas de la rénovation thermique, c’est l’émergence d’un tiers investisseur hors système bancaire qui vienne s’insérer dans le dialogue postulants au logement/ architecte en inversant le rapport de pouvoir entre le logeur et le logé.
Dans une telle perspective de refonte la plateforme internet est un formidable média de socialisation des enjeux de la ville. C’est en même temps, si la décision urbaine reste au plus près des habitants, une formidable opportunité pour les petites structures d’architecture d’accéder à la commande.
Même si les EPCI assurent la stratégie urbaine, le niveau communal est indispensable pour favoriser, réguler, encadrer un tel phénomène.
De son côté la profession peut inventer son propre système de plateforme en poursuivant ce qui est déjà à l’œuvre sur les sites des ordres régionaux.
Ce texte est issu d’une réponse à un questionnaire adressé par le Conseil national de l’Ordre aux futurs candidats à l’élection présidentielle, il y a quelques semaines.
Architecte - Métropole - 33000
Complètement d’accord ! (cf. un autre sujet…)
Nous pouvons inventer notre propre système, ou même connecter, fédérer, encadrer les plateformes existantes qui le désirent et qui existent déjà, en un écosystème dont nous tirerons davantage encore de bonheur et de réussite.
Je prépare un article sur ce sujet, ici bientôt.
En plaisir d’en débattre aussi. 🙂
Architecte - Métropole - 75011
La finalité de l’acte de construire est un bâtiment concret, solide, et sûr. Oui, Yannick Jadot, mais cette finalité épuise-t-elle le rôle de l’architecte ?
Lorsqu’un bâtiment est concret, solide, et sûr, il reste, en fait, inachevé, inabouti : Car lorsque, entre les matériaux, apparaissent certains rapports, lorsque, entre les espaces et les volumes, naissent certaines tensions, lorsque, par la forme donnée, la mémoire et la rêverie illuminent l’habiter, alors le projet prend une autre dimension, une dimension culturelle qui transcende sa dimension fonctionnelle.
Les rapports, les tensions, les références ne trouvent leur cause ni dans une exigence du programme ni dans une nécessité de la construction, ils parlent aux sens et à l’esprit. Le bâtiment abritait une activité humaine, il émeut maintenant le passant ou l’habitant. Il était de la construction, il est désormais de l’architecture.
L’espace, les volumes, la lumière, les matières, sont les vrais matériaux de l’architecture, et l’architecture fait de ces matériaux, par un programme utilitaire sur un site donné, une œuvre culturelle. L’architecte donne du sens, il met la construction au service d’une pensée de l’espace. Même et surtout lorsque la construction est destinée au plus fragiles de nos concitoyens…
Le premier rôle de l’architecte est de bien construire. Son vrai rôle est d’émouvoir.